mardi 31 août 2010

La-haut, le Lahaul

A la fin du trajet en bus infini, Paul, le jeune etudiant de Dehli qui rappelle a Magali son ami Paul, le jeune etudiant de Paris, nous avait conseille l'hotel tenu par son cousin Kuldib. A la descente du bus, c'est un moustachu jovial qui nous accueille : "Welcome sssiiirrr". Sumrila est une guesthouse splendide. Notre chambre a deux fenetres donnant sur la vallee, le lit est couvert de couettes super epaisses qui vont nous tenir chaud la nuit. La salle de bain est impeccable, et le chauffe-eau donne en 20 minutes un plein ballon d'eau bouillante. A l'etage, notre moustachu que nous allons vite surnommer "papy", excellent cuisinier, nous prepare les plats que l'on veut, tandis que nous patientons en terrasse, vue imprenable sur les sommets enneiges. Soyons honnetes, on a fait une nuit de 15h a notre arrivee, puis une "journee morte" ou nous sommes a peine descendus voir le centre de la petite ville, ou plutot du gros village qu'est Keylong.
L'Inde est le premier pays ou nous eprouvons l'envie (presque le besoin) de manger occidental. On est heureux de manger pizzas, frites et poulet grille, plutot que les typiques riz en sauce, qui sont bien trop lourds pour nos estomacs, et qui risqueraient de nous faire (re)prendre un petit bidon a l'indienne. Notons quand meme que les restaurants servent des repas "de fete" alors que la cuisine maison est plus simple et plus digeste. Notre petit luxe de Keylong, c'est de boire du the au citron : un regal, dont je realiserai apres quelques jours l'effet laxatif, que notre "papy" sert en hochant la tete : "please sssiiirrr, thank you sssiiirrr". Incessament, il arbore ce que nous avons le plus de plaisir a retrouver ici dans les montagnes : le sourire. Certes a Chandigarh, et meme deja a Dehli, on avait retrouve des gens qui souriaient, mais d'une maniere generale, les indiens de la plaine du Gange ont un comportement tres froid, le sourire est rare, et souvent donne du bout des levres. Ici pas de chichis, on sourit, on rit, on rigole, et les habitants entre eux en font de meme. Pour la premiere fois depuis notre arrivee en Inde a Calcutta, on se sent juste bien. Il faut dire que les temperatures ideales nous changent de la fournaise de la plaine.

La premiere balade que nous faisons a pour objectif le gompa (monastere), que nous voyons depuis notre chambre, de l'autre cote de la vallee. Le pont est bien entendu recouvert de drapeaux a priere tibetains. A peine commencons nous a grimper de l'autre cote qu'une jeune femme, Sarla, se met a nous guider. Elle fait de nombreuses pauses pour nous laisser respirer, car ce n'est pas facile a 3200m, puis nous explique qu'il faut passer a gauche des amas de pierres gravees de prieres. On traverse des champs de patates et de pois, puis apres pas loin d'une heure de montee, nous arrivons au gompa. La terrasse domine la vallee, et nous y passons un moment a nous emerveiller devant ce paysage, tandis que Sarla monte voir les nones pour ouvrir le temple. A l'exterieur, les dragons et les lions peints montent la garde. Tout autour du batiment, nous faisons rouler de petits rouleaux a prieres. A l'interieur, on trouve de nombreuses statues de Bouddhas, des portraits des differents lamas locaux dont bine sur l'inevitable dalai lama, dont nous raterons de 4 jours seulement le passage dans la region. Sur les murs est peinte la vie de Bouddha : travail de grande qualite vraisemblablement fait recemment, les tableaux sont tres colores, et l'on se sent vraiment bien dans ces lieux.

A la descente, Sarla nous montre un autre temple, beaucoup plus intime celui-la, a l'interieur d'un petit hameau. Tres sobre, les dalles de pierres ou nous posons les pieds nus sont glacees. Un rouleau a prieres assez grand git au sol : il est casse, ce qui nous permet de voir qu'a l'interieur se trouvent des pages et des pages de prieres enroulees, qui sont "recitees" quand le rouleau tourne. J'aime beaucoup ce systeme de prieres automatiques, semblable a celui des drapeaux dont le texte est "lu" par le vent. L'autre curiosite est un rocher a l'interieur du temple, sur lequel se trouvent trois traces sacrees. On n'a pas bien compris, Sarla ne savait pas nous expliquer. Est ce un Bouddha, un oiseau, un animal quelconque qui a laisse ces traces ? Nous ne savons pas. Pourtant le lieu que nous explorons a la lumiere du brioquet est emprunt d'une atmosphere etrange. On fait le tour du temple pour faire rouler les prieres, puis on renfile nos chaussures pour le chemin du retour.

Pres du pont, on s'arrete dans l'herbe pour souffler un peu. C'est jour de chance : nous sommes 3 et nous trouvons 3 trefles a 4 feuilles. Sarla nous raconte son boulot. Elle travaille pour le bureau des forets indiennes, et doit s'assurer que les paysans ne coupent pas les arbres. Job tranquille, qui lui demande quand meme de beaucoup marcher. De retour en ville, elle nous emmene manger des momos (raviolis tibetains a la viande) dans une dhaba, c'est a dire un petit restaurant populaire.

Le jour suivant, on visite un autre gompa, au dessus de Keylong cette fois. Il est plus ancien, mais tout aussi joli. La balade qui nous y mene nous fait passer dans des champs, un ravin de ruisseau, et surtout voir des quantites de fleurs d'altitude. Formes, textures, couleurs sont variees, mais on prefere la petite etoile violete a 5 branches. On apercoit les chambres des moines, qui sont des lieux resolument depouilles. Matelas et quelques vetements sont le seul mobilier d'une piece ou trone un poele a bois.

Le dernier gompa que nous visitons est facilement accessible par la route, mais le site est tres spectaculaire. Les batiments ont ete construits contre la falaise, dans un renfoncement de la montagne. Des drapeaux de prieres tendus sur des dizaines de metres depuis le promontoire dessinent un triangle qui entoure le temple. Le lieu est fascinant, les moines qui passent la matinee a repeindre un rouleau a prieres gigantesque sont tres accueillants. On passe un moment sur les tapis du temple. Aux murs, des divinites etranges a milles bras et trois yeux. Les lieux sont d'une sereinite incroyable.

C'est le jeudi 12 aout que nous avions prevu de partir en trek pour la journee. On envisage d'aller a Gondla, un village un peu plus loin sur la route, en passant par un col a 4400m d'altitude. On se leve a 4h45, "papy" nous prepare le petit-dejeuner a 5h10, ainsi que des sandwiches pour le trajet. A 5h30, il commence a pleuvoir, pour la premiere fois depuis que nous sommes a Keylong. On tente la randonnee quand meme, en se disant qu'on se sentirait ridicules de rester la si a 7h la pluie s'arrete pour laisser venir le soleil. Mais a 7h, il pleut toujours autant, et on se dit que ce serait idiot de passer le col sous la pluie, en plus d'etre dangeureux, car l'eau risque d'entrainer des glissements de terrain. On est de retour a 8h, et on se fait une journee couette. Il pleuvra jusqu'a 16h quasiment sans discontinuer.

Heureusement pour nous, la tele a une chaine de cinema en anglais. On mate Swimfan, Pearl Harbor, la Recrue avec Al Pacino et Bruce tout puissant. L'echec de ce trek nous rappelle la malediction recurrent a notre tour du monde : depuis mes diarhees de Choquequirao, il y a eu la pluie de Baru, les 37 degres de Ayers Rock, les inondations aux Macdonnel ranges, les vilains guides de Batur et meme l'abscence de pluie au rafting a Pai.

Heureusement, le vendredi 13 maudit la malediction, et nous partons sous un soleil radieux ! La vue devient rapidement fantastique. Les sommets enneiges au loin, nous longeons un canal a flanc de colline pendant un moment, puis on s'eleve. Evidement, les indications (orales, car il n'y a pas de carte) que nous avons eues sont foireuses, et le chemin se perd dans un paturage. On marche longtemps a travers des champs de fleurs fantastiques, jusqu'a trouver un berger qui nous indique le chemin. C'est un petit homme au sourire radieu, emmitoufle dans sa couverture, la tete couverte d'une sorte de beret cylindrique. De loin, il s'assure que nous passons au bon endroit, car la pente est raide, et domine de vilains pierriers.

Enfin, on arrive au col peu apres le dejeuner (sandwich fromage moutarde, une benediction de "papy"). La haut, un autre berger, accompagne de son chien farouche, nous montre l'interieur de la stupa, ou des dizaines de bougies brulent. A l'exterieur, battus par les vents, les drapeuax flottent par centaines. Nous sommes sur une crete, l'epine dorsale du dragon. A droite et a gauche, des murs de sommets enneiges. Pourtant, si ce sont bien les dents de Siva, celui ci a de vilaine scarries, car a bien des endroits, la neige a deja fondu ! La redescente est douce, on admire la montagne en face, ou un glacier immense pend comme le nez d'un geant, avant de chuter en deux cascades successives, comme une goute au nez gigantesque. Plus bas, un ruisseau sort de la pente, couvert de fleurs roses. Enfin, apres 11h de marche, nous voila a Gondla, ou l'on retrouve Kuldib, le patron de notre hotel (plus jeune que son employe "papy"), passe rendre visite a sa famille, qui nous paye le taxi apres 2h d'attente du bus qui ne passait pas. De A a Z, notre sejour a Keylong aura te un plaisir.

1 commentaire:

  1. moi ce qui me fait jérémie c'est que tu es trés original dans ta tenue vestimentaires et pas du tout "conservateur!!!!"

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