Le jour qui n'existait pas

Apres notre matinee au bord de la piscine, on se remet en route. Cette fois, c'est un grand black qui conduit le minibus de l'hotel : lunettes noires, beret visse sur la tete, demarche ample et deguingandee, c'est avec un sourire jusqu'aux oreilles qu'il rend un service impecable, en depit de son accent incomprehensible. Nous enregistrons nos bagages en deux coups de cuillere a pot (vous savez d'ou ca vient cette expression, vous ?) et on se retrouve a tourner en rond pendant trois heures dans un terminal minuscule : a peine une librairie, un Burger King (burp, on n'en veut pus, on en a mange a midi) et un Star Bucks. On fait trois fois le tour, puis atelier ecriture. Assez vite arrive l'embarquement. On laisse passer l'immense file des gens presses de s'asseoir pour 15h de trajet et on se met a nos places. Coup de chance, on est deux pour trois places, donc on a de l'espace, et on pourra s'alonger chacun notre tour. C'est notre premier vol chez V Australia, et on les recommande. Pas besoin d'avoir decolle pour faire mumuse avec l'ordinateur, et c'est Janis Joplin et bob Dylan plein les oreilles que nous decollons au dessus d'un tapis de lumiere.

En moins d'un quart d'heure, la cote est hors de vue. Elle reapparaittra deux minutes avant l'atterissage a Sydney. Entre temps, l'ordinateur de bord nous montre la progression de l'appareil sur la carte : un grand rectangle bleu traverse d'un trait diagonal rouge a l'arriere du dessin de l'avion, pointille a l'avant. Pas tres utile pour se reperer, mais tellement drole.Par le hublot, nous ne verrons que du noir, du noir et quelques etoiles, mais surtout du noir.

Cette alocalisation du voyage renforce cette impression que j'ai souvent d'etre teleporte quand je me deplace en avion : a peine 15h de nuit pour traverser l'ocean le plus grand du monde : 1/3 de la surface du globe. D'ailleurs, en plus d'un voyage dans l'espace, ce voyage est l'occasion d'un voyage dans le temps. Par une magie du calendrier, nous partons le 12 au soir pour aterrir le 14 au matin : 15h de nuit d'une seule traite. Le soleil du 13 mars 2010 ne se levera jamais, ni ne se couchera d'ailleurs, dans nos vies. C'est lui, le jour porte disparu, celui que l'on perd en voyageant autour du monde d'Est en Ouest. C'est le jour a cause duquel le Tour du monde en 80 jours de Phileas Fogg devait tourner dans l'autre sens. Un beau symbole de notre voyage... Et puis que repondrons nous a un hypothetique inspecteur de police nous demandant ou nous etions la journee du 13 mars 2010 ? Enfin il y a pire, comme Caroline que nous rencontrerons a Sydney qui a perdu un jour d'anniversaire comme ca. Est elle plus jeune d'un an ?

Mais soyons serieux, et etudions scientifiquement la question. Tout d'abord, les donnees du probleme : nous prenosn l'aon le 12 a 19h le soir, et arrivons le 14 a 5h le matin apres 15h de vol. L'element explicatif crucial est sans aucun doute la celebre ligne de changement de date qui a permi a quelques happy few de changer de millenaire trois fois dans leur vie. Pour la clarte de l'expose, nous admettrons que la variation de longitude de l'avion s'effectue a vitesse constante. Procedons par methode, et utilisons une discussion hypothetique. La premiere possibilite est que la ligne de changement de date soit situee a mi-distance exacte de Sydney et Los Angeles. Dans ce cas, nous arrivons a la ligne a minuit le 12 au soir, et passons de l'autre cote a 0h01 le 14 au matin. Dans ce cas ideal, le samedi 13 mars 2010 a disparu corps et bien. Plus probablement, la ligne est situe un peu avant ou un peu apres la mi-distance du trajet. Si la ligne est situee avant, c'est a dire a l'Est du barycentre Sydney-Los Angeles, nous arrivons a la ligne a 23h le 12 et la franchissons a 23h01 le 13. Dans ce cas, notre journee du samedi 13 existe bel et bien, mais ne dure qu'une heure avant les 0h01 du dimanche 14 au matin. Inversement, si la ligne est situee apres, c'est a dire a l'Ouest, nous commencons la journee du 13 au matin, arrivons a la ligne a 1h00 et franchissons a 1h01 le 14 au tin. Dans ce cas aussi le samedi 13 existe bele t bien, mais se cantonne a un matin court au lieu d'une courte fin de soiree dans l'hypothese precedente.

Pour vous assurer que vous avez bien tout compris, reflechissez au probleme si nous avions vole de Sydney a Los Angeles. Si vous n'y arrivez pas, rassurez vous : si tout cela me parait tres simple, Magali n'y comprend rien, donc vous ne serez pas seul ! En fait, loin de problemes de maths, nous avons passe la nuit a regarder des films. On a vu le debut de This is it, le film sur Michael Jackson, mais c'etait vraiment chiant, alors Magali a regarde le Dernier danseur de Mao, puis le dessin anime Fantastique maitre renard, alors que je me faisais une nuit de l'horreur : Harry Potter 6, Jennifer's body et Shinning, en me goinfrant de cacahuetes. Avant d'aterrir, on a meme trouve les jeux videos et joue comme des gosses. Bref un vol super sympa, direction les nouvelles aventures !